La déontologie ne serait-elle qu’une question de confiance ?

Depuis toujours il y a eu entre les allées de l’Etat et les chemins de l’Entreprise privée, des chemins de traverse que certains considèrent comme indispensables car ils permettent des fertilisation croisées entre deux cultures, celle de l’intérêt général et celle des intérêts particuliers. Mais ces chemins, parfois tortueux sont aussi souvent très dangereux, car vous avez bien compris, au milieu du chemin il y aura vraisemblablement conflits d’intérêts. Et cela est vrai de tous temps et en tous lieux. Il serait donc vain de vouloir nier le risque tout comme il aurait été irresponsable de ne pas en tirer les conséquences en baliser ces chemins de traverse de garde-fous efficaces. C’est ce qu’on appelait, selon le cas, charte éthique ou règles de déontologie.

Et pourtant il arrive souvent des accidents de parcours qui interrogent sur l’efficacité de tels protections. L’actualité fourmille d’exemples en la matière.

Prenons d’abord ce cas très surprenant https://www.francetvinfo.fr/Le ministre de l’Agriculture se défend de tout « conflit d’intérêts » après le recrutement controversé d’une conseillère Publié le 09/05/2023 10:44. Je veux bien admettre que pour piloter la communication d’un ministre aussi important que le ministre de l’agriculture, il vaut mieux faire affaire avec quelqu’un de chevronné. D’ailleurs quand on regarde le parcours de la plupart de ceux qui occupent ces postes dans d’autres ministères, ils sont passés par le service « communication institutionnelle » de grands groupes de communication et/ou de publicité. Par contre, c’est prendre en grand risque d’aller chercher le grand officiant de la communication d’une organisation qui se revendique comme étant LE lobby des industries agro-alimentaires surtout quand on est aussi ministre de la souveraineté alimentaire. En effet même si formellement il ne peut plus y avoir de contact avec ses anciens employeurs, on ne peut effacer ni des liens de connivence qui ont pu se nouer au long d’une longue collaboration, ni l’imprégnation d’un argumentaire qu’on a souvent contribuer d’ailleurs à façonner.

Admettre que tout cela puisse rester cloisonné suppose une confiance inébranlable dans la force de caractère du conseiller. Du coup, on se demande pourquoi avoir mis en place des règles déontologique si la seule confiance aurait pu suffire.

Mais il n’y a pas qu’en France que de tels pratiques existent. Nos voisins belges sont aussi victimes de ces cousinages « nécessaires » mais encombrants https://www.lesoir.be/La ministre De Sutter dénonce l’ambiguïté du statut de bpostPublié le 9/05/2023 à 19:08. Là aussi la ministre considère que ses experts sont au-dessus de tout soupçon et leur fait donc confiance. N’empêche qu’elle les a quand même virés, profitant au passage pour égratigner l’entreprise par laquelle le scandale arriva. Autre pays autre mœurs, sans doute.

Il n’est pas jusqu’à nos amis allemands qui soient également touché par ces indélicatesses mais sur un autre registre, le népotisme https://www.euractiv.fr/Le parlement allemand débat des allégations de népotisme dans l’« affaire du témoin » publié le 11 mai 2023 à 7:39 (mis à jour: 8:12). C’est une autre forme de conflits d’intérêts mais encore une fois le sous-ministre en question ne remet pas en cause la confiance qu’il a dans son « témoins ». Après tout, s’il l’avait choisi comme témoin, c’est bien qu’il lui faisait totalement confiance. Alors, ce qui est vrai dans la sphère privée ne devrait-il pas l’être aussi dans la sphère publique. C’est toute la question que pose ce cas. C’est à l’honneur du régime parlementaire germanique d’avoir mis cette question en débat dans son Parlement.

Pour finir, terminons par l’épilogue judiciaire d’une autre affaire de conflits d’intérêts, française cette foishttps://www.letelegramme.fr/L’enquête sur les liens de Valérie Pécresse avec Alstom classée sans suite Publié le 10 mai 2023 à 22h19. Ne jugeant que les faits le tribunal a blanchi la présidente de la région Ile de France arguant qu’au moment de l’attribution d’une subvention, elle ne détenait pas de titres de la société subventionnée. De toute façon, un juge ne peut juger que sur la base d’une plainte : si on parle au juge de « stock-options » pourquoi voulez-vous qu’il réponde « relations maritales ». Du coup, ce serait faire peu de cas du fait que son époux a été cadre dirigeant de ladite entreprise de 20211 à 2022. Mais le tribunal dans sa grande sagesse aurait donc fait confiance : on ne parle pas « business » à la maison.

Comme vous le voyez, il ne serait donc pas nécessaire de mettre en place des règles compliquées pour éviter tout conflit d’intérêts, il suffit de faire confiance aux gens de qualité.

Il n’empêche : Wladimir Oulianov, que par ailleurs je ne vénère pas, aurait dit « la confiance n’exclut pas le contrôle. » Sur ce coup-là il n’avait pas tort.

Publicité
Cet article, publié dans démocratie, je dis ton nom, est tagué . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.