Les prédateurs

Dans un pays comme la France, quand on parle de nourriture, on se serait attendu à discuter gastronomie, grande cuisine, grands chefs, restaurants de prestige mais pas « restos du coeur » et soupe populaire. Or c’est devenu le lot quotidien de centaines de milliers de nos concitoyens.

Ne plus pouvoir se payer de quoi manger CORRECTEMENT est a priori inconcevable dans un pays dont le niveau de vie est un des plus élevé du monde, dont le système de protection social est parmi les plus solides.

Que les aliments coûtent de plus en plus cher pourrait s’expliquer si, en amont les producteurs étaient bien rémunérés, ce qui n’est pas le cas de la plupart d’entre eux malgré la loi Egalim. Il y a donc bien entre ces producteurs sous-payés et ces consommateurs mal-nourris, une grande partie de la valeur qui s’évapore, mais pas pour tout le monde. C’est ce qu’explique cet économiste dans le Journal Le Mondehttps://www.lemonde.fr/« Le don de nourriture est devenu la béquille d’un système alimentaire prédateur » Publié aujourd’hui à 07h00, modifié à 07h00. Ces prédateurs se trouveraient répartis tout au long de la chaîne d’approvisionnement et de transformation.

De fait, depuis deux ans, les prix des produits alimentaires de base ont fortement augmenté, bien plus que l’inflation moyenne, bien plus que les revenus du travail ou de la solidarité nationale. Et doctement et benoîtement, le même journal Le Monde nous donne, famille de produits par famille de produits, toutes les « bonnes » raisons pour expliquer ces hausses https://www.lemonde.fr/Un an d’inflation en France : des légumes au pain, la hausse des prix de 31 produits expliquée Publié le 17 mai 2023 à 17h28, modifié le 21 mai 2023 à 14h01. Mais il est regrettable que l’analyse n’aille pas jusqu’au bout. Ainsi, pourquoi le prix des engrais a-t-il flambé ? Pourquoi le prix du blé français a-t-il flambé ? Pourquoi le prix des betteraves françaises a-t-il flambé, alors que les betteraviers avaient réussi leur coup d’intox auprès des parlementaires et obtenu le report d’une interdiction d’un pesticide nocif, permettant un maintien de leur rendement ? Derrière les évidences avancées par Le Monde, il y a donc des zones d’ombre, là où justement se sont constituées des profits indus.

Et cela devrait durer car comme le décrit, toujours aussi benoîtement et doctement, Le Monde https://www.lemonde.fr/Pourquoi les prix à la consommation ne baissent pas malgré le recul de ceux des matières premières Publié le 06 mai 2023 à 06h00, modifié le 06 mai 2023 à 08h04 , les phénomènes de déstockage sont plus lents que les phénomènes de stockage et si les hausses de prix se répercutent rapidement tout le long de la chaîne, par précaution, il y a un effet de cliquet pour les baisses, toujours par précaution. Ce décalage permettra vraisemblablement de confortables plus-values.

Et si tout cela ne suffit pas, il restera toujours la bonne vieille spéculation qui parie sur la rareté passagère, fortuite ou voulue, pour réaliser de coquettes plus-value https://www.lesechos.fr/Les traders se ruent sur le jus d’orange, plus rentable que le pétrole Publié le 22 mai 2023 à 7:00Mis à jour le 22 mai 2023 à 7:08. Le seul mérite de ces spéculations, c’est leur franchise : elles sont l’oeuvre de prédateurs qui assument leur statut d’oiseaux de proie et pour les quels, peut importe la proie, pourvu qu’elle soit juteuse.

Et c’est alors que l’on débat du pouvoir d’achat en berne un peu partout dans le monde, que Les Echos publient, sans forfanterie excessive quand même, ce bulletin de triomphe https://www.lesechos.fr/Les dividendes versés dans le monde au premier trimestre battent encore un recordPublié le 24 mai 2023 à 6:56. Il n’y a aucune arrogance dans ce constat, juste un peu de modestie « le rythme de progression des dividendes se ralentit ». Et si dividendes plantureux il y a c’est évidemment parce que l’an dernier il y a avait des profits exceptionnellement élevés qui ont concernés les grandes entreprises de presque tous les secteurs d’activité (voir supra).

Et c’est dans ce contexte que les syndicats de salariés, CGT mis à part, et les syndicats patronaux ont signé un accord sur le partage de la valeur. Le gouvernement, pas faraud pour deux sous, veut l’entériner par la loi https://www.latribune.fr/Partage de la valeur : le projet de loi présenté en Conseil des ministres ce mercredi22 Mai 2023, 14:06. On aurait beaucoup à redire sur un accord qui transforme en quelque sorte des salariés en actionnaires de deuxième rang en substituant aux augmentations de salaires, qui correspondent à leur statut de salarié, une participation aléatoire aux bénéfices de l’entreprise, aléa qui est l’apanage des actionnaires.

On pourrait également rajouter qu’il y a là une perspective intéressante si ce partage de la valeur se traduit par une participation au capital. Regroupés, ces salariés-actionnaires auraient alors leur mot à dire en assemblée générale des actionnaires, pour, par exemple, remettre en cause …le partage de la valeur ou des pratiques prédatrices. Mais là je suis dans l’utopie.

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