Un plan rantanplan

Cela fait des semaines que le ministre en charge de la transition écologique tire la sonnette d’alarme « Il faut se préparer à une hausse des températures moyennes de 4° ! ». Il faut dire qu’il a beaucoup à se faire pardonner depuis son inquiétant mutisme face aux incendies de forêt, au sécheresses sahariennes de l’été dernier. C’est vrai que dit comme ça +4°, ça fait froid dans le dos, si je puis dire.

Du coup, pour faire face à cela, il lance une grande consultation publique en vue d’élaborer un Plan National d’Adaptation aux Changements Climatiques (PNACC) https://www.ouest-france.fr/Climat : le gouvernement va lancer une consultation pour préparer un réchauffement jusqu’à + 4 °C Publié le 21/05/2023 à 08h20. Il présente cela comme une démarche innovante de démocratie participative. C’est « oublier » un peu vite que cette démarche existe depuis plus de 20 ans et il y a déjà eu deux PNACC , le PNACC1 de 2012 à 2015 puis e PNACC2 de 2018 à 2023. ils ont chacun donné lieu à une évaluation, dont la teneur est à la hauteur des ambitions de ces plans, médiocre.

Que retient-on de cette décennie de planification ? Une meilleure connaissance des phénomènes ? Certainement. une meilleure sensibilisation des décideurs politiques et économiques aux risques liés au changements climatiques ? Vraisemblablement puisque ils ont été au moins confronté au redoutable exercice de rédiger des documents d’aménagement au contenu aussi ardu que leur nom, SRADDET et PCAET. Une meilleure prise en compte de ces risques dans les projets d’aménagement ou de développement d’activité ? Peut-être, encore que là, d’autres considérations , notamment des intérêts privés, ont vraisemblablement été prises en compte qui ont subtilement miné le bien-fondé de ce qui précède.

Voilà donc un PNACC3 sur les rails. Il faut espérer que la nouvelle évaluation qui sera faite des PNACC 1 et 2 mettra en évidence surtout les lacunes méthodologiques de la démarche planificatrice.

En effet, commençons par les prolégomènes. Parler d’un réchauffement de +4° c’est sûrement une manière d’attirer l’attention, mais si on ne précise pas que c’est à l’échéance du siècle, on laisse le lecteur tétanisé par ce chiffre et l’impression que tout est inéluctable. En 75 ans, il peut se passer des choses. Il y a 75 ans, l’Europe commençait à peine à sa reconstruction, la Chine sa communisation et l’URSS sa première bombe atomique.

Et c’est là où justement les deux premiers PNACC pêchent méthodologiquement. En effet, en ne parlant que prévention des risques, les planificateurs ne font qu’atténuer les symptômes, sans s’attaquer aux causes du mal. Or, c’est sur ces deux points qu’il convient d’agir simultanément, ce que, heureusement, certains acteurs du PNACC appellent le traitement simultané de l’adaptation et de l’atténuation des changements climatiques.

Il convient aussi d’avoir en tête les échéances. En effet, si 75 ans c’est loin, les évolutions récentes montrent que sur la dernière décennie au moins, les experts ont pêché par excès d’optimisme. Quand on ne fait rien ou pas assez, la détérioration est plus rapide que prévue. Donc, c’est bien beau de panser les plaies, c’est encore mieux d’éviter de se blesser.

C’est pourquoi, la demande d’une « pause » dans l’élaboration de nouvelles normes communautaires apparaît décalée. Ce n’est pas quand l’incendie s’est déclenché qu’il convient de demander une pause pour vérifier que les nouveaux pompiers ont été correctement formés.

Il faut au contraire accélérer ce mouvement de mutation du logiciel économique de façon à ce que l’adaptation porte autant sur la prévention des risques que sur la réduction de ceux-ci en attaquant les causes. Mais cela supposerait que nos dirigeants politiques et économiques actuels aient changé eux-mêmes de logiciel, ce qui est loin d’être le cas si on en croit les propositions actuellement sur la table.

Commençons par le chef. Manifestement, il n’a pas oublié que pendant quelques années il a joué au banquier et ça laisse des traces https://www.ouest-france.fr/Emmanuel Macron profite du G7 pour promouvoir son « pacte financier international » Publié le 21/05/2023 à 05h59 mais un pacte financier qui ne se fonderait pas sur un pacte écologique consensuel ne serait jamais qu’une opération financière comme les autres, juste un peu plus vertueuse, peut-être.

Et puis, l’enfer étant pavé de bonnes intentions, la volonté affichée de freiner l’artificialisation des sols est confrontée à la dure réalité de l’économie rurale https://www.lemonde.fr/Transition écologique : le gouvernement englué dans la bétonisation des sols Publié le 19 mai 2023 à 14h00, modifié le 19 mai 2023 à 23h36. En effet, plaquer une mesure technocratique , limiter les artificialisations futures à un rythme de moitié des artificialisations passées, c’est évidemment pénaliser les communes vertueuses, qui avait préservé leur environnement. Nul n’est besoin de sortir de Polytechnique pour comprendre que la moitié de zéro, c’est….zéro. Du coup les petits maires râlent et les fameuses ZAN ont un peu de plomb dans l’aile. Un peu de pédagogie vis à vis des élus, un peu de bon sens chez les technocrates devrait pourtant permettre d’arranger les choses.

Mais, puisqu’on en est à parler des élus ruraux, il est évident que certains d’entre eux, parmi les sénateurs, ont séché les cours du soir quand des ONG ont proposé des sessions de formation à la transition écologique aux parlementaires https://www.lemonde.fr/Proposition de loi sur la « ferme France » : « L’objectif du texte du Sénat n’est pas d’œuvrer pour l’agriculture française, mais d’élargir la fenêtre d’Overton » Publié le 21 mai 2023 à 05h30, modifié à 10h00. En effet, compte tenu des connaissances scientifiques accumulées depuis deux décennies, il est parfaitement stupide de proposer un retour au modèle agricole qui plaisait tant aux dirigeants de la FNSEA. Tiens en voilà encore d’autres qui devraient changer leur logiciel économique.

Finalement, il n’est donc pas sûr que les PNACC 1 et 2 ait eu l’efficience pédagogique qu’on en attendait. Ne présumons pas du PNACC 3 pour autant. En effet, il ne faut jamais désespérer de la nature humaine et peut-être que dans le cours des échanges autour du futur PNACC, ces économistes pourront se faire entendre. https://www.lemonde.fr/« Donner à “l’économie écologique” plus de place dans le débat public » Publié le 20 mai 2023 à 09h00, modifié à 12h31

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