L’ESS est avant tout un projet politique , le cas de Railcoop

Peut-être n’avez-vous jamais entendu parler de Railcoop. Pour faire vite, RAILCOOP

est une Société Coopérative d’Intérêt Collectif , une SCIC comme on dit en langue abrégé, qui profitant de la « libéralisation » du transport ferroviaire, veut redonner du sens au transport ferroviaire en associant voyageurs, cheminots, collectivités locales et transporteurs privés à la définition d’un modèle citoyen de transport.

Il ne vous a pas échappé que le réseau ferré français est à l’image de l’organisation de ce pays depuis des siècles, c’est à dire très centralisé et rayonnant autour de son centre Paris, ce qui fait que par exemple pour aller de Lorient à Bordeaux, il est souvent plus rapide de passer par Paris plutôt que de longer le littoral atlantique.

Les mésaventures de cette SCIC depuis le début de l’année illustrent bien que, dans ce cas au moins, l’ESS est un projet politique, mais que ce projet n’est pas sans embûche dans un système économique qui s’y prête mal.

Commençons par le meilleur. L’arrivé dans le capital de la SCIC de grosses collectivités locales est un signe que la décentralisation est au cœur du projet https://www.rtes.fr/LA MÉTROPOLE ET LA VILLE DE LYON ENTRENT AU CAPITAL DE RAILCOOP Publié le 15 février 2023 – mis à jour le 16 février 2023. Toutefois, qu’il s’agisse de Lyon n’est toutefois pas innocent, ni neutre. En effet si on se réfère aux réseaux préexistant à la création de la SNCF, Lyon c’est le « L » du principal réseau ferré privé le PLM. Ce fut aussi la première gare desservie par un TGV. L’arrivée de Lyon est donc symbolique d’une continuité mais peut-être aussi d’une rupture si au lieu d’être une étape entre Paris et Marseille, cela signifie que Lyon peut devenir un point d’appui à des liaisons transversales Est-Ouest ou Nord-Sud (Lyon-Bordeaux ou Lille-Reims- Dijon-Lyon par exemple). Reste maintenant à convaincre les régions qui sont la plupart du temps les autorités organisatrices des mobilités de se mouiller également et là, en Auvergne-Rhône-Alpes, ce n’est peut-être pas gagné.

Or, justement, la seconde annonce de l’année de Railcoop a été de confirmer le lancement de la ligne transversale Lyon-Bordeaux, via Périgueux, Limoges Guéret, Gannat et Montluçon https://www.novethic.fr/RAILCOOP annonce l’ouverture de la liaison Bordeaux-Lyon à l’été 2024, malgré des embûches Publié le 12 mars 2023. C’est l’exact opposé du schéma actuel de la SNCF qui privilégie encore les liaisons rapides de métropoles à métropoles. Face donc à un modèle jacobin centralisé, on a donc un modèle que, sans jeu de mot, je qualifierai de girondin, décentralisé et c’est à dessein que j’ai cité parmi les gares desservies, Guéret et Gannat. Il y a dans ce projet de première ligne un modèle proche du cabotage, dont on sait qu’il permet une vascularisation de territoires, sans cela, exsangues.

Hélas, et c’est là la troisième nouvelle de l’année, ce projet rencontre beaucoup de difficultés à émerger https://reporterre.net/Relance du train : Railcoop sur de mauvais rails 15 mai 2023 à 14h45

Mis à jour le 16 mai 2023 à 09h22. Parmi les obstacles rencontrés, il y a bien sûr un manque de bonne volonté des gestionnaires des réseaux, mais là ce ne sont pas les seuls à avoir subi ces tracasseries de la SNCF. COMBIWEST société de fret ferroviaire crée par les coopératives légumières bretonnes pour desservir les Pays de Loire, Rhône-Alpes et PACA sans passer par Paris en a fait les frais.

A ces difficultés s’en ajoute une autre qui est la nature même de la société. A partir u moment où le statut de SCIC impose les règles « un homme= une voix » et « lucrativité limitée », les sources de financement se tarissent. En effet, ces deux critères sont parfaitement antinomiques des valeurs prônées par les financeurs de start-up : pouvoir de décision sur le projet, forte rentabilité et grosse plus-value de cession à la sortie. Il y a là un beau chantier ouvert aux mastodontes de la finance ESS, banques coopératives ou mutualistes, mutuelles d’assurances, pour démonter que lorsqu’il le faut, il peuvent abandonner leur mimétisme capitaliste et revenir aux principes fondamentaux, notamment que l’argent n’est qu’un moyen au service d’objectifs d’utilité sociale.

Notons enfin que au cœur du projet ferroviaire de Railcoop, il y a des préoccupations très écologiques, la première étant d’être une alternative à l’avion, mais là il ne faut pas être pressé mais aussi une alternative à la voiture, du fait des dessertes locales plus fréquentes.

Tout ceci mis bout à bout fait que Railcoop est un bon exemple de ce qu’un projet politique, au sens le plus noble du terme, peut produire comme alternative au modèle économique dominant.

Et pour terminer, tout en restant dans le domaine du ferroviaire, on ne peut que regretter qu’une société d’Etat, la SNCF, pensant aller vers l’efficacité, semble avoir oublier ses obligations de service public pour ne garder que des critères de rentabilité immédiate, ses dirigeants étant persuadés que le modèle capitaliste est le parangon de l’efficacité.

Or un des meilleurs connaisseurs de l’ESS n’est pas de cet avis https://reporterre.net/Alternatives : « Finissons-en avec l’idée que seul le capitalisme serait efficace » 9 mai 2023 à 14h53Mis à jour le 9 mai 2023 à 16h05 . Le succès en fin de compte d’initiatives come Railcoop, mais aussi Enercoop pour ce qui concerne la fourniture d’électricité décarbonée et décentralisée devrait lui donner raison.

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