Il y a plus de quatre j’avais repris sur ce blog les avis de 3 personnes dont la perspicacité, chacun dans son domaine, était une référence pour leurs pairs. J’avais intitulé cela « Avis de grand frais » en référence aux alertes météo que connaissent bien tous les marins et qui invitent à faire au moins preuve de vigilance, prendre quelques mesures pour réduire l’emprise au vent, voire même changer de trajectoire.
5 ans après, les coups de vent se sont succédés, crise grecque non résolue, faiblesse de l’euro, etc… mais vaille que vaille, le système économique et monétaire européen se maintient. Mais jusque quand, puisque les réformes de fond réclamées par les trois signatures que je citais dans ce billet n’ont pas été menées à leur terme. Nul doute qu’un jour ou l’autre, les tensions, que fait naître cet architecture bancale monnaie commune/politique budgétaire mal coordonnée/politique économique encore plus mal concertée, vont se raviver et le vent va de nouveau se lever . Or, un navire qui a subi un coup de vent a beaucoup souffert et si rien n’a été fait pour réparer les gréements fatigués, il n’est pas sûr que le prochain avis de grand frais soit plus difficilement « étalé ».
Mais si encore, il n’y avait que les problèmes financiers, ce serait moindre mal car « plaie d’argent n’est pas mortelle » comme on dit. Par contre d’autres vents mauvais se sont levés en Europe et autour de l’Europe. Certains sont anciens comme les dérèglements climatiques, d’autres plus récents, mais dont les racines sont anciennes, comme la menace terroriste de radicaux qui se cachent maintenant derrière l’alibi religieux pour assouvir une haine d’un monde qui ne leur convient pas. Chacune de ces tempêtes serait peut-être gérable mais leur concomitance rend leur résolution simultanée très difficile.
Oui il y a bien un avis de tempête, sur l’Europe, mais aussi sur le reste de la planète car pas plus que le climat, la folie meurtrière ne connait pas les frontières et les premières victimes de ce terrorisme sont ceux que ces bourreaux font passer pour des coreligionnaires égarés. Face à cela, tout le monde doit monter sur le pont et il faut espérer qu’à la barre, il y a des « barreurs de gros temps » et non plus des « fins tacticiens cherchant la risée » Et comme pour le moment, l’essentiel des moyens disponibles se trouvent en Europe et en Amérique du Nord, c’est là que l’essentiel des efforts doit porter. Dieu, si on peut dire, nous protège de l’arrivée d’irresponsables et de fous furieux qui des deux côtés de l’Atlantique n’ont, comme seule réponse, que le repli sur soi et la fermeture aux autres , car ce n’est pas en fermant le capot du cockpit qu’on empêche le bateau de chavirer . Je remarque d’ailleurs que ce sont souvent les mêmes qui pour des raisons obscures ferment également leurs cerveaux à certaines évidences comme la réalité du changement climatique.
Mais oublions un instant ce qui se passe Outre-Atlantique pour nous concentrer sur le continent européen ou du moins sur les 27 Nations qui forment l’Union Européenne. Dans mon billet précédent, je faisais référence au référendum danois, « Le NON danois » , et j’y parlais d’un nouveau modèle européen. L’actualité de ces deux derniers jours nous apporte la confirmation de ce manque de cohésion au sein même de l’Union. En effet dans les coulisses de la COP 21, 11 pays européens SEULEMENT veulent apporter dans la corbeille de l’accord global, leur union autour du projet de taxe sur les transactions financières. Riche idée, si elle sert à financer le plan énergétique pour l’Afrique car on ferait d’une pierre trois coups.
1° coup : une des raisons essentielles des crises financières à répétition, ce sont justement ces transactions financières à la nano-seconde. Les taxer contribuerait, un peu, à réduire les dégâts de la spéculation financière et ce serait toujours ça de gagner, en espérant que ce répit donnera suffisamment de sagesse aux gouvernants européens pour résoudre l’équation monnaie/budget/économie dont ils n’ont toujours pas trouvé l’inconnue.
2° coup : financer le développement des énergies renouvelables en Afrique serait le meilleur moyen que ce continent se détourne des énergies fossiles pour assurer son développement car en l’état actuel des choses, il n’y a pas de développement possible sans recours accru à l’énergie. Mais aussi plus prosaïquement, en apportant une source de chaleur renouvelable , on diminuera d’autant les ponctions sur la forêt, ou ce qu’il en reste, pour des usages domestiques. Or moins de forêt, c’est plus de CO².
3° coup : en offrant de nouvelles perspectives de développement aux Etats africains, on ouvre la perspective d’un avenir à des populations qui faute d’en avoir un, soit se jettent sur les routes en espérant que celui-ci existe au-delà des mers, soit se jettent dans les bras de fous sanguinaires.
Or, tout ceci laisse un goût amer d’inachevé car c’est désunie que l’Union Européenne va proposer ce « deal ». Le « NON » danois au renforcement de la coopération judiciaire et policière fait écho à d’autres « NON » sur les mêmes sujets et sur d’autres. Or rien n’est pire dans une tempête qu’un équipage qui n’agit pas en même temps et dans le même sens. Agir ensemble et pour un même but, cela s’appelle la solidarité, vertu cardinale des gens de mer. Il ne vous aura pas échapper que ce beau mot ressemble à un autre, dont aurions bien besoin ces jours-ci : solidité.
Solidarité/solidité : joli doublon qui vient de solide, « ce qui tient ensemble ». Nous connaissons tous les contraires de ces deux mots : égoïsme et fragilité. L’enjeu est là car la tempête est proche.